SAINT MORT_____________________________
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Mythe,
légende
ou réalité
- Chapelle Saint-Mort - Haillot
Le souvenir est
toujours présent dans la région, des visites
régulières de pèlerins venant
vénérer saint Mort, dans le hameaux du
même nom sur les hauteurs de Andenne, aux limites des villages de Haillot et Coutisse, dans l'actuelle commune
de Ohey.
Après
quelques instants de
méditation devant l’autel, suivant un rite séculaire, les
visiteurs de Saint-Mort,
enfant et adultes, viennent toucher et vénérer la pierre
par une ouverture sous
l'autel.
-Pierre sous l'autel et
intérieur de la chapelle Saint-Mort -
Haillot.
Après
l'élévation de saint Mort sur les
autels en 1621, une chapelle qui date de
cette époque fut
construite à Haillot, sur le site
où le
saint serait décédé. Sous l'autel, un
mégalithe qui selon la légende, aurait
été l'oreiller et le siège du saint trouvé
dans la hutte, en cet endroit de la
forêt du Condroz, où le saint vécut en ermite.
C'est dans
cette petite église que
saint Mort fut l'objet d'une grande vénération, surtout
avant la guerre 14-18.
Le premier dimanche d'août, jour de la procession, des milliers
de pèlerins
convergeaient vers Haillot et Saint-Mort, venant de toute la
région du Condroz
et de la Famenne. Cette église connaît encore aujourd'hui
une procession et une
vénération locale. Les prières et invocations
actuelles concernent
principalement les maux de dents des jeunes enfants.
Autour de l'ouverture, il est écrit:
L'AN 613 DE CE LIEU
ST-MORT MONTA AUX CIEUX
En 1466, le moine Gérard de
Gingelom, sous-prieur du monastère de Saint-Laurent près
de Saint-Trond,
réfugié à Huy à cause des guerres et
visitant la
paroisse, se renseigna sur la
personnalité de saint Mort. Son récit est consigné
dans un manuscrit sorti de
l'abbaye Saint-Laurent à Liège et conservé
à la bibliothèque royale, à
Bruxelles. (Texte rapporté dans saint Mort –
François Jacques – Edition
Condroz-Meuse – 1971)
" L'an du seigneur
quatorze
cent soixante-six, durant le séjour à Huy de notre
seigneur abbé à cause des
guerres désolant le pays, le moine Gérard de
Gingelom fit le tour des paroisses de Huy et arriva
à
l'église
appelée " à Saint-Mort " ( au saint mort). S'informant
auprès des
paroissiens , pour savoir qui était ou avait été
ce saint mort, on lui
répondit:
Il y avait une
fois de braves villageois d'Antvalle (Andenelle) de bonne et pieuse
compagnie,
à qui il arriva, par la volonté de Dieu , que la femme
enceinte, ressentit mort
dans ses entrailles, l'enfant qu'elle portait. Elle se lamentait de
cette
situation et s'en désolait. Mettant son espoir en la
miséricorde de la bénie
mère du seigneur Jésus, elle fit le vœu d'exposer, s'il
se pouvait devant
l'autel de la Bienheureuse Vierge Marie
de la Vignette (Huy ) l'enfant qu'elle portait en son sein.
Après ce vœu, elle
mit au monde un enfant mâle, mais mort. Elle le prit et le porta
à l'autel de
la Bienheureuse Vierge Marie de la Vignette et, devant l'enfant, et
avec des
larmes, elle proféra sa prière. L'enfant reçu la
vie et, au baptême le nom de
Mort. L'enfant grandit, se mit à vivre la vie d'ermite.
Après le décès de ses
parents, il distribua tout son bien aux pauvres et, dans la
simplicité de son
cœur, il s'appliqua à servir Dieu. C'est pourquoi il
était très aimé de tous et
surtout des religieuses d'Andenne. Or, des brigands, poussés par
une
inspiration diabolique et s'imaginant qu'il détenait
caché beaucoup d'argent,
le tuèrent. Ne découvrant rien auprès de lui, ils
s'empressèrent de prendre la
fuite. En apprenant ces faits, les dames d'Andenne, qui connaissaient
son
innocence, envoyèrent un chariot pour emporter son corps et lui
donner une
sépulture en leur église. Mais lorsque la
dépouille eut été préparée et
disposée sur le chariot, les chevaux ne voulurent avancer
d'aucune manière,
bien qu'ils y fussent énergiquement engagés à
coups de fouet. Tout le monde était
stupéfait. L'un des assistants de s'écrier : " pourquoi
ces fichus chevaux
refusent-ils d'avancer? Laissons-les aller librement où ils
veulent et ainsi
nous découvrirons la volonté de Dieu ". Les chevaux
abandonnés à
eux-mêmes, sans conducteurs, amenèrent le corps par les
routes tracées et des
chemins détournés, à travers les buissons et les
champs, à l'église de
Notre-Dame de la Vignette, où il avait été
présenté à sa naissance par sa mère
et tiré de la mort. On l'enterra entre deux piliers; les malades
venus à son
tombeau jusque aujourd'hui y sont guéris, pour l'honneur de dieu
et la louange
de son nom, de la goutte, du mal de
dents et d'autres affections".
Le même
auteur, François Jacques,
donne un
texte relaté par Godefroid Petit, curé de Saint-Mort au
milieu du XVIe siècle.
Saint
Mort, d'après nos ancêtres, naquit au voisinage d'Andenne
et y mourut; il reçu
toutefois la vie par une faveur divine et, au baptême, on
l'appela mort né. Il
survécut néanmoins, menant une humble vie, au milieu
d'hommes frustes, dans la
forêt, leur prêtant assistance dans la fabrication de
charbons de bois. Enfin
il choisit de vivre, dans les bois autour d'Andenelle, une vie d'ermite
qu'il poursuivit saintement jusqu'au
dernier jour de son existence. Or, comme plus personne ne l'apercevait,
des
voisins le recherchèrent consciencieusement et le
découvrirent mort. Quand ils
voulurent transporter sa dépouille à Andenne, les chevaux
mus par dessein divin
se rebiffèrent; mais lorsqu'on les tourna vers Huy, ils se
rendirent, sans la
moindre difficulté, à l'église paroissiale de
Saint-Jean l'Evangéliste. C'est
là que repose son corps honorablement
inhumé dans la nef de l'église, entre deux piliers. On le
voit représenté en
tenue d'ermite : pieds nus, les cheveux épars sur les
épaules, âgé apparemment
de quatre-vingt ans, vêtu d'un manteau qui lui tombe sur les
talons. Il tient
de la main droite un chapelet avec un bâton ; de la gauche, un
livre. Il est
coiffé d'une calotte telle qu'en portent les frères
mineurs sous leur capuchon.
Il porte une longue barbe relevée de couleur d'or. En dessous,
son corps est
recouvert d'une pierre. Sur celle-ci, une autre pierre, en guise
d'autel,
s'appuie sur des colonnes : on y dépose les offrandes des
pèlerins qui y
affluent chaque jour dévotement pour être
délivrés du calcul, du mal de tête,
de dents, des douleurs de jambes et d'autres maladies. Mais on y offre
en
ex-voto, en fer et en cire, des jambes, des couronnes, des bras de
même que des
bandages, du sel, des pièces de monnaie, des poules, des poulets
et d'autres
hommages du même genre. Ceux-ci aux temps anciens étaient
offerts en plus
grande quantité et avec une dévotion plus
considérable que maintenant, quand
celle-ci s'illustrait au profit des infirmes, de miracles plus
nombreux, lesquels
à présent se font plus rares en raison d'un zèle
décroissant. C'est de là que
ce saint homme tire sa célébrité auprès des
siens, depuis un temps immémorial,
et que les curés célèbrent sa mémoire le
jour de saint Mort, abbé.
Les
plus anciens documents écrits, relatant la légende de
saint Mort
remontent au XVe siècle. Il ne faut sans doute pas
s’en étonner. La
vénération de saint Mort ( porcher ou berger) comme celle
de sainte Orbie
(servante de sainte Begge), personnages d'origine
modeste, même
si elle fut
vivace à certains égards, n’a guère
été populaire au delà des limites du
Condroz et de la Hesbaye. De cette époque où
vécurent saint
Mort et sainte Orbie,
aucune information écrite ne nous est parvenue. Les faits
marquants de
l'histoire, s'ils sont consignés par écrit au moment de
leur déroulement,
même édulcorés en fonction de la sensibilité
du script, restent un gage de
fiabilité. Mais pour des faits de moindre importance, ou pour
les
événements
populaires, l'histoire se perpétue
oralement et dans des récits contés. Au fil du temps, la
tradition orale évolue
et son contenu peut se transformer. Notre propos, ne sera donc pas de
mettre en
doute qu'un saint homme ait pu vivre en ermite à cette
époque, dans les bois
de Coutisse et Haillot, faire le bien autour de lui et par la suite,
être
l'objet d'un culte et d'une fervente dévotion populaire. Si le
culte de saint
Mort est resté très régional, c'est que
justement si l'église inscrit aux
sources de la foi, aussi bien les documents écrits que les
récits oraux, cette
dernière par manque de crédibilité historique
n'aura pas aidé ce culte à un développement plus
grand. Cette histoire a prit naissance dans une
région où
rayonne une institution religieuse, un monastère de
bénédictines fondé à la fin
du VIIe siècle par sainte Begge.
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- Statue et autel sainte Begge - Collégiale d'Andenne.
Que les dames d'Andenne, se
soient intéressées à ce saint homme au point de
lui assurer une sépulture
digne de sa vertu, et par la suite aient encouragé et soutenu le
culte de sa
renommée, on peut le croire. Mais sa vie fut peut-être
associée à celle de
sainte Begge postérieurement, ajoutant au culte de saint Mort
la célébrité du
monastère, et de cette manière, tirer profit du
rayonnement que les moniales
exerçaient sur la population. La date inscrite sur l'autel de la
chapelle de
saint Mort semble assez fantaisiste. Les récits les plus
anciens relatés plus
haut, ne font pas allusion à sainte Begge. Celle-ci serait
née vers 610. Ce
n'est que vers la fin de sa vie, en 691 que Begge fonde le
monastère d'Andenne,
pour décéder en 693 ou 694. Pour pouvoir associer
la vie de saint Mort à celle
des moniales d'Andenne, il semble que les dates mentionnées au XVIIe
siècle, par Philippe de
Saulcy, curé de
l'église Saint-Mort
à Huy, soient
plus réalistes. Il situe la naissance de saint Mort en l'an 698,
au
sein d'une
famille de charbonniers. Mort décède l'an 778 à
l'âge de quatre-vingts ans,
après une vie d'ermite. Selon la légende, Mort
jeune-homme, devient gardien
des troupeaux de Begge et regrette
de ne pouvoir assister chaque matin à la messe. Au son de la
cloche du
monastère appelant les religieuses à l'office, Mort
s'agenouille au milieu
de son troupeau pour prier. Un jour, Begge lui demanda qui gardait les
bêtes,
puisqu'on le voyait chaque jour agenouillé près de
l'autel
à la messe. Voyant
son étonnement, Begge compris que par la grâce divine, le
garçon avait le don d'ubiquité, lui permettant
d'être présent dans deux endroits différents en
même temps. Pour que Mort ait
été au service de Begge vers 693 âgé d'une
vingtaine d'année, on devrait
idéalement situé sa naissance vers 673 et son
décès à quatre-vingt ans vers
753.
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- Eglise
St Mort à Huy -
Notre Dame de la Vignette
C'est au XIIIe
siècle que le quartier sud de Huy, baigné par les
eaux sauvages et imprévisibles du Hoyoux commence son
développement urbain.
C'est par là que pénètre dans la ville, la
grande voie des Ardennes et
du Condroz. En 1322, on y cultive la vigne comme sur toutes les
collines
entourant la ville et notamment en direction de Liège. De
là, probablement le
nom de la patronne du lieu, notre Dame de la Vignette. C'est
également de ce côté de la ville que vont
s'installer les drapiers, aidés par le courant
tumultueux du
Hoyoux qui actionne leurs installations. La première mention
de l'église
Saint-Mort date de 1216. Ses origines sont donc bien
antérieures,
mais le
passage du droit de collation au chapître d'Andenne, se fait
à la
fin du XIIe
siècle. C'est bien plus tard que l'on attribue la fondation de
cette église à
sainte Begge. Les recherches archéologiques sur les
différentes phases de la
construction de l'édifice ont permis de repérer un site
mérovingien, les
vestiges d'un édifice carolingien, ainsi que des travaux de
l'époque romane et
gothique. Si l'urbanisation de ce faubourg de Huy a surtout
progressé au XIIIe
siècle, on peut supposer que les moniales d'Andenne, si elles ne
sont pas à
l'origine de la fondation de l'église dédiée
à saint Jean l'Evangéliste,
ensuite à Notre-Dame de la Vignette, en ont très
tôt contribué à sa
destinée. La vie du saint ermite à toujours
été liée au chapitre d'Andenne. Ce
n'est donc pas étonnant que sa sépulture ait
été érigée dans cette église de
Huy dont la patronne est la prévôte d'Andenne. C'est
également au XIIIe siècle,
que s'effectue la transformation du monastère des
bénédictines d'Andenne, en
chapitre noble de chanoinesses libres de tous vœux. A partir de cette
époque, le
recrutement des chanoinesses se fait exclusivement dans la noblesse. Au
fil des
siècles, jusqu'à seize quartiers de noblesse sont
exigés pour entrer au
chapitre. C'est le 9 mai 1624, sous le pontificat d'Urbain VIII, que le
cardinal Pierre Aloïs Caffara, évêque de Tricarico (
1624-1655), alors nonce à
Cologne et dans les Pays-Bas procède à
l'élévation du corps de
saint Mort sur les autels. En 1796, le mur du
cimetière est démoli. En février 1811, le
collatéral sud de l'église est rasé.
Après avoir servi de chapelle à l'hospice civile de Huy,
le bâtiment est
maintenant destiné à l'entreposage des archives de
l'hôpital de Huy. Les reliques
de saint Mort, tant vénérées au fil des
siècles reposent à présent honteusement
dans les caves du musée de Huy ! Pourtant au XIIIe
siècle, saint Mort
jouit déjà d'une grande popularité depuis pas mal
de temps, et les pèlerins lui montrent une grande
vénération. Sa châsse
était promenée à travers la ville dans
les processions annuelles depuis le moyen âge.
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- Châsse
de saint Mort
- Vitraux
église Saint Mort de Huy
Pour
qui veut approfondir un peu l'histoire d'une région et
dépasser ce sentiment de
merveilleux sacralisé par des légendes auxquelles
s'accroche la ferveur
populaire, en plongeant au cœur de la symbolique hermétique
présente sur beaucoup
de vielles pierres et dans de nombreux édifices religieux, le
voyage peut-être
tout aussi fabuleux.....
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